Vous avez peur de la mort ? Alors vous avez peur de vivre ! Si vous voulez vraiment vivre, vous devez accepter de mourir !
Cet article a été écrit en collaboration avec mon amie Martine Bouillon, vice-procureur à la retraite, auteur et consultante juridique, férue de mythologie grecque et égyptienne.
Le nom Déméter (Δημήτηρ) semble être une altération d’un mot grec qui signifie Terre-Mère. Elle est la déesse de l’agriculture et des moissons et représente la terre cultivée et féconde. Elle a enseigné l’agriculture aux êtres humains. Elle préside donc aux grains, aux semailles et à toutes les productions agricoles. Hésiode la qualifie de « divine entre les déesses ». Elle est la Terre-Mère dans toute sa plénitude.
Déméter est aussi appelée Déméter Thesmophoros, ce qui signifie “celle qui a apporté des lois”. En effet, c’est Déméter qui a institué le mariage et a donné un statut social aux femmes. Les Thesmophories, fêtes qui se déroulaient sur trois jours, étaient dédiées à la célébration de cet aspect plus moral de la déesse. Seules les femmes mariées y participaient et aucune prêtresse n’y était requise. Ces célébrations ont subsisté à Rome sous la forme d’une fête nommée Bona Dea. Les Thesmophories ressemblaient aux Éleusinies, les Mystères d’Éleusis, qui étaient célébrées tous les quatre ans, ou tous les ans selon les régions, en l’honneur de Déméter. L’initiation aux Mystère d’Éleusis, fêtes de nature ésotérique, était l’une des formes les plus élevées de la spiritualité grecque. Elle avait pour but de révéler, à ceux qui y participaient, la signification profonde du lien qui unissait Déméter à sa fille Perséphone, et les rôles d’Hadès et de Iacchos, souvent assimilé à Dionysos. Elle initiait les grecs aux concepts de la mort et de la résurrection. La divulgation des mystères était puni de mort.
Déméter est l’une des 12 divinités olympiennes et fait partie de la première génération d’olympiens. Elle résidait principalement à Éleusis, au contact de la terre, plutôt que sur l’Olympe.
Comme tous les êtres divins, la déesse des moissons possède des attributs qui sont :
- Le narcisse, fleur préférée de sa fille Perséphone et dont sa cueillette lui a valu d’être enlevée par son oncle Hadès, dieu des enfers qui, voyant sa beauté, a voulu en faire son épouse.
- Le pavot, symbole :
- De fertilité du fait de ses nombreuses semences,
- Du sommeil de la terre en hiver,
- De la force de l’oubli dans la période qui suit la mort et précède la renaissance.
- Le flambeau, allumé au feu de l’Etna pour :
- Lui permettre de continuer à chercher, la nuit, sa fille Perséphone enlevée par Hadès,
- Célébrer Iacchos qui est, selon les versions, le fils de Déméter ou celui de Perséphone, son époux ou celui de sa fille. Celui-ci apparaît tardivement dans les écrits. C’est Hérodote, historien et géographe grec, considéré comme le premier historien de l’histoire (IVème siècle avant J.C), qui le mentionne pour la première fois. Iacchos est le personnage central des Mystères d’Éleusis et conduit la procession du plus important jour des célébrations (20ème jour du Boédromion, c’est-à-dire le le 20ème jour du 3ème mois du calendrier athénien).
- Le serpent, fils de la terre et animal chtonien par excellence, qui traîne le char de Déméter. De par sa forme, il est un symbole d’éternité et d’éternel recommencement : l’ouroboros de la vie à la mort, et de la mort à la vie. De par son changement de peau régulier, il est une représentation parfaite de la rénovation et de la résurrection.
- La grue qui apporte le signal du labourage et annonce un hiver pluvieux.
- Le blé (sous forme de couronne ou de gerbe) et la faucille (représentant les moissons).
- Le bélier.
- La tourterelle.
- La ciste mystique utilisée lors des mystères.
- Le vase rempli de fleurs et de blé.
Les êtres humains lui offraient généralement des sacrifices non sanglants, à l’exception de la truie, qui est un rappel du troupeau perdu d’Euboulos, englouti avec ses truies et verrats, en même temps que Perséphone lors de son enlèvement. Euboulos signifie “conseiller des dieux”.
Lors des Thesmophories, il était d’usage de jeter des porcs vivants, dans un puits qui menait à des souterrains consacrés dans lesquels vivaient des serpents. Ceux-ci se nourrissaient de ces victimes sacrificielles par excellence car le sang de porc, plus que tout autre, était porteur de la notion de purification.
Déméter est la deuxième fille de Cronos et de Rhéa. Elle est la sœur et l’épouse, pour un moment, de Zeus. Du roi des dieux, qui a essayé de la prendre de force, elle eut une fille Perséphone, connue d’abord sous le nom de Koré, nom qui signifie “jeune fille”. Elle est la jumelle d’Héra, qui épousera Zeus plus tard, et également la sœur d’Hestia, de Poséidon et d’Hadès.
Pour échapper aux ardeurs de Poséidon qui ne régnait pas encore sur la mer, Déméter pris la forme d’une jument. Malheureusement, son subterfuge ne réussit pas car son frère se transforma en cheval et la viola. De cette union sauvage naquirent deux enfants dont Déméter se désintéressa totalement car ils étaient issus d’un viol :
- Un cheval immortel, et doué de parole, nommé Areiôn, qui avait une crinière couleur de mer et deux pieds humains. Il participa à la guerre de Troie et finit sa vie avec Héraclès.
- Une fille dont il était interdit de prononcer le nom pour les non initiés. Les initiés, quant à eux, l’appelaient “Despoina” ce qui signifie, la maîtresse, la reine, la non-vie, l’incréé, le néant, le pourrissement. Aveugle, elle pouvait putréfier tout ce qui se trouvait autour d’elle. L’un de ses autres noms était Mélancolie (humeur noire).
Déméter vécu un amour passionnel avec Iasion, (Iasos ou Iacchos), nom qui signifie “le semeur”. Ce personnage central des Éleusinies a une histoire un peu complexe. Selon les versions, il est :
- Le fils de Déméter et de Zeus, et serait donc, à ce titre, le frère de Perséphone,
- Le fils de Perséphone et de Zeus, qui aurait séduite celle-ci sous la forme d’un serpent. Fruit des amours de Zeus et de Perséphone, il serait alors à la fois le fils et le petit-fils du roi des dieux de l’Olympe.
- La nouvelle version de Zagreus, lui-même réincarnation de Dionysos (le deux fois né). Dionysos serait, selon les versions, le fils de Déméter, Perséphone, Sémélé ou Io).
- Zagreus qui a pour frère Dardanos, considéré comme le fondateur de la ville de Troie. Ils ont comme père Zeus et comme mère Électre, l’une des 7 Pléïades, filles d’Atlas et de l’Océanide Pléioné.
Iacchos, en tant que Zagreus, fils de Zeus et de Perséphone (ou d’Électre, selon les versions), eut à subir les foudres de sa tante Héra, folle de jalousie car le roi des dieux voyait en lui son futur héritier. Pour empêcher que cela ne se produise, elle envoya, à la poursuite de l’enfant, les Titans pour le mettre en pièces. Le petit Zagreus essaya de leur échapper en se transformant successivement en lion, en tigre, en cheval, en serpent et en taureau. Malheureusement pour lui, les Titans le rattrapèrent, le tuèrent, le dépecèrent et commencèrent à le dévorer. Zeus intervint, foudroya les Titans et ordonna à Apollon de rassembler et d’enterrer les membres restant. Pallas apporta au roi des dieu le cœur de l’enfant qui palpitait encore. Celui-ci l’avala et lui donna naissance une deuxième fois, sous le nom de Iacchos. Zeus le destinait à régner auprès de lui. Selon certaines versions, des cendres des Titans, précipités dans le Tartare, est né l’humanité (selon d’autres version ce serait en fait les quelques lambeaux de chair qui se trouvaient encore sur les os du petit Zagreus qui auraient servi à créer les hommes).
En dépit de toutes ces péripéties, Iacchos péri de la main de son père qui, fou de rage, comprit le lien qu’entretenait sa sœur et son fils en voyant le champ, trois fois labouré, dans lequel les deux amants s’étaient unis. De cette union naquit Ploutos, dieu qui avait pour tâche de parcourir la terre et d’y répandre l’abondance.
Tout en représentant la terre, Déméter ne se confond pas avec sa grand mère Gaïa, symbole de la terre cosmique, car elle règne sur la terre qui :
- Est cultivée,
- Est apprivoisée 3 fois,
- Donne le blé,
- Se trouve être le centre de la Sicile, grenier à blé du monde antique,
- Est appelée Éleusis, site qui se trouve dans la région d’Athènes, et qui garde et célèbre ses mystères.
Déméter est beaucoup mieux organisée, élaborée et différenciée que Gaïa.
Elle crée le temps :
- Celui des semailles,
- Celui de la germination,
- Celui des moissons.
La déesse des moissons a donné une nouvelle dimension aux déesses. Elle est gaie et aime la vie : elle crée la vie ! Elle aime aussi passionnément sa fille Perséphone, pourtant le fruit du viol de Zeus, transformé en taureau pour perpétrer son forfait, au point de ne plus avoir goûté à quoique ce soit lors de sa disparition.
L’enlèvement de Perséphone
Perséphone a été enlevée par Hadès lors d’une simple promenade champêtre alors qu’elle s’était éloignée pour aller cueillir des narcisses.
Sa mère l’a vainement recherchée pendant 9 jours et 9 nuits, durée pendant laquelle elle reste sans manger, sans se laver, sans se reposer et sans dormir. À la fin de cette période, elle apprend que Zeus, le propre père de Perséphone, l’avait donnée à Hadès sans lui en parler.
Prostrée, déprimée et tombée, lors de ses recherches, du char d’Hélios, à Éleusis, Déméter délaisse tout et se désintéresse de la fertilité. Les plantes alors meurent, les animaux ne se reproduisent plus, le lait des vaches se tarit et les hommes craignent un avenir où ils n’auront plus rien à manger et aucune perspective de récoltes.
De son côté, Hadès, pour s’attacher définitivement Perséphone et l’empêcher de retourner sur terre, utilise la ruse et lui fait manger un grain de grenade. Selon la tradition, celui qui se rend en enfer annule toutes ses chances d’en ressortir s’il mange, pendant son séjour, quoi que ce soit au royaume des morts. Hadès change ensuite le nom de Koré en celui de Perséphone. Étant donné qu’elle avait accepté de consommer quelques grains de grenade, elle était considérée comme partiellement consentante.
Voyant l’état du monde, Zeus intervient auprès d’Hadès pour trouver un compromis. Tous deux finirent par trouver un accord dans lequel Perséphone devra vivre 4 mois par an avec Hadès et 8 mois avec sa mère, le temps qu’il faut pour moissonner, semer et récolter le grain. Une variante de ce mythe attribue 6 mois à chacun des protagonistes.
C’est ainsi qu’à chaque printemps Perséphone remonte sur la terre accueillie par les 3 Heures, filles de Zeus et de Thémis, personnification des saisons, et par sa mère qui enthousiaste, fait revenir la végétation et couvre la terre de feuilles, de fleurs et de fruits.
Toutefois, dès les dernières semences mises en terre et les derniers fruits engrangés, Perséphone se doit de retourner chez son époux, et c’est à ce moment-là que Déméter retourne à sa déprime et à son deuil, et que la nature partage avec elle son chagrin.
D’après les récits, Déméter :
- Demeure à Éleusis lors de cette période de deuil pendant laquelle elle ne se souvient de rien d’autre que du fait que sa fille a perdu son nom. Elle semble réellement avoir perdu la raison
- Demande une place de servante chez le roi Céléos et sa femme Métanira qui lui offrent l’hospitalité ainsi que le kykéon, sorte bouillie donnée lors de la célébration des mystères.
- Réclame que le souverain lui confie son jeune fils afin qu’elle puisse l’élever. Toutefois, surprise par la reine alors qu’elle posait l’enfant dans l’âtre, Déméter décline son identité. Son acte avait pour but de rendre l’enfant immortel, mais le fait qu’elle ait été découverte annule l’opération. Néanmoins, la déesse comble l’enfant de bienfaits. Elle lui confie un grain de blé, lui offre un moulin, ainsi que le mode d’emploi pour s’en servir. Elle lui enseigne aussi l’art d’atteler les bœufs et de tailler le soc des charrues. Elle lui apprend à faire le pain traditionnel appelé Triptos, mot qui a donné à l’enfant son nom : Triptolème. Déméter fait de cet enfant le premier laboureur et lui fait don d’un char tiré par des dragons ailés avec pour mission de distribuer partout le blé pour nourrir les hommes.
Déméter eut également une relation amoureuse avec Philomènos qui inventa la charrue après s’être uni à elle dans un sillon. À Éleusis, il menait la procession des initiés en dansant tout en tenant un flambeau entre ses mains. Pour remercier son amant pour son invention, Déméter le mit dans le ciel et il y forma la constellation du bouvier.
Déméter eut également une passion pour Macris, une nymphe, fille d’Aristée, qui fut chargée par Hermès de nourrir Dionysos enfant. Par amour pour elle, elle enseigna l’art des semailles et de la moisson aux Titans de la deuxième génération sur son île appelée Drépané (la faux). Nous sommes en droit de nous demander s’il ne s’agissait pas de la faux ayant émasculé Ouranos… ou bien était-ce la sienne ?
Déméter est aussi la déesse mère de :
- La terre productrice,
- De la fécondité des sols et des humains
- De la mort
- Du mariage.
La déesse possédait également le pouvoir de résurrection… Les Éleusinies traitaient de la chaîne éternelle de la vie et de la mort. Ces mystères ayant été bien gardés, nous n’en avons que peu de témoignages.
Déméter est une divinité chthonienne qui ordonne et qui se confond avec sa fille Koré, qui est chthonienne de par sa mère et olympienne de par son père. Il ne faut pas oublier que Déméter n’est olympienne qu’un tiers de son temps, préférant parcourir la terre les deux-tiers restants.
En tant que femme fécondant les éléments, elle est associée aux nymphes des sources et des rivières.
Elle est avec sa fille Perséphone et son fils adoptif Triptolème « la déesse de l’alternance de la vie et de la mort ».
Les motifs référant à Déméter dans les rêves, et dans les voyages chamaniques, renvoient à des notions comportant un principe d’alternance :
- Mort et résurrection,
- Perte et retrouvailles,
- Dépossession et abondance,
- Oubli et remémoration,
- Joie et tristesse (voire dépression),
- Solitude et accompagnement.
Démeter est une déesse double et ce côté est incarné par sa fille Perséphone. Elles sont souvent confondues l’une avec l’autre. Ne pourrait-on dire que c’est la descente dans l’incarnation et la matière qui est à l’origine de cette dualité ? Qu’en pensez-vous ? N’hésitez pas à échanger sur ce sujet en laissant un commentaire sur Facebook !
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Rêvons et voyageons ensemble !
Natacha R. Kimberly
Sophie Marie GHI Mingelbier says
Bonjour, comment je dois interpreter ces dieux et croyances si je frequente des grecs sans connaitre la tradition, que je ne connais pas l
Natacha Kimberly says
Bonjour Sophie,
Je suis désolée pour ma réponse tardive. Malheureusement, le tableau de bord de mon site ne m’avait pas signaler qu’il y avait des messages en attente.
Pour répondre à votre question, je dirais que tout est une question de lecture et d’apprentissage. Même si vous ne les connaissez pas, vous pouvez toujours en apprendre plus sur l’histoire et les mythes concernant les dieux de la Grèce Antique. Un auteur, un chercheur en amène un autre. Il faut juste un peu de patience pour trouver les bonnes références. Faites vous confiance car votre intuition sait vers quoi vous guider.
Si vous avez besoin, n’hésitez pas à me laisser un message en passant par le formulaire de contact. Cela arrive directement dans ma boîte mail.
Belle soirée à vous et à bientôt,
Natacha